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16 février 2015 1 16 /02 /février /2015 17:44

Dans le bar, l’ambiance devenait passionnée, les gens gueulaient des louanges et beuglait des cantiques à la gloire du héros ! De l’alcool gratis en ces temps de misère, c’était une offrande des dieux …. Ils seraient faire bon usage d’une telle providence et s’en rendre « digne ».

Certains voulaient porter le maire, mais à midi trente, ils étaient déjà à point, le petit chauve en costume tempéra quelque peu les ardeurs des piliers du comptoir, en les détournant du maire et en les invitant à porter une chaise imaginaire. Hilares et serviles, ils s’exécutèrent avec un entrain sincère sous mes yeux incrédules. L’un d’eux essaya même de monter dessus à plusieurs reprises, sans succès.

Les gueules devenaient cramoisies au fur et à mesure des minutes, les bouteilles s’enchainaient et se vidaient à un rythme d’usine. Des stakhanovistes de la picole…

Imaginez-le en Moise vous menant vous et votre peuple de plébéien-chômeur (chassé de son pays par un pharaon ou un despote n’ayant plus besoin de vous, vous chassant avec des huissier-SS-garde suisse) dans un pays désertique, aride, avec un soleil qui transforme le palais de votre bouche en carton sec condensé, après deux jours sans boire et là ! Là ! Le voilà ! Une putain de fontaine de vin, lui sortant de l’urètre quand tout le monde ne pouvait plus avancer…

Un manneken pis de la transsubstantiation au moment critique, charmant angelot abreuvant par sa sainte verge les damnés de la terre. Un faiseur de miracle, ce Maire. L’eucharistie aurait lieu, foi ou pas, et double ration pour les impies, on lui rendra grâce et on s’en souviendra, l’esprit à jamais marqué par le cerveau cloué dans les chiottes.

Le maire lui tout sourire, serrait des mains, faisait ses blagues « spécial prolo » qu’il ressortait invariablement depuis 22 ans quand il venait à rentrer en contact avec les indigents. « Et là PAF le chien ». Personne ne l’écoutait vraiment car sa petite musique, ils la connaissaient par cœur, mais la gaieté semblait unanime et la reconnaissance acquise. Et tout le monde, d’aller de son serrage de paluche ou de son accolade en se resservant un verre au passage…


Germaine profita même, de l’étreinte, pour s’astiquer l’entrejambe avec beaucoup d’entrain sur le genou du maire qui souriait avec une complaisance hautaine et dans l’indifférence générale, c’eut été un chien, le résultat aurait été le même … Son amour de l’humanité n’avait pas de limite.

Raymonde, qu’on avait rangé dans un coin du bar jouxtant les waters, après son K-O, revenait doucement d’entre les morts. C’était le maire qui l’avait réveillé pour lui serrer la main et s‘enquérir de sa santé. Au toucher de la main chaude du Maire, elle avait ouvert les yeux et était sorti de son tombeau. Et encore un putain de miracle. Par simple apposition des mains …

Le maire, THE messie, avait sortie Lazare du monde des morts ! Il ne s’attarda pas plus longtemps sur son cas. Un bileux, un hépatique, une victime de colique néphrétique attendait sa main quelque part dans ce bar .Il continua imperturbable sa tournée. Aujourd’hui, deux écrouelles pour le prix d’une !



Raymonde, quant à elle, avait dégrisé quelque peu, elle émergeait péniblement, elle prit donc son foie à deux main et rattrapa son retard sur le peloton qu’il l’avait distançait de quelque décigramme par litre de sang, en enchaînant trois verres cul sec.

Les verres défilaient, le tavernier n’arrêtait pas une seconde, le comptoir étaient assaillis. Tous réclamant un peu plus de sang christique amélioré, Jérusalem allait tombé (ou se retrouvé à sec), le maire qui avait fort chaud et transpirer à fort goutte, s’épongea le front et fit tombé un mouchoir, le suaire se fit ramassé diligemment par Germaine, dieu seul sait ce qu’elle avait l’intention de faire avec une telle relique, certainement se mettre dans une transe profonde et extatique en priant les mains jointe.

Robert, de son côtés, pris dans une divine révélation, était complètement parti, il avait fait une échappé sur le peloton, il partait seul en sprint vers des contrés dont seul lui avait connaissance, un paradis perdu semblait être à sa portée. Son visage était touché par la béatitude.

Les gens le considéraient, à présent, comme un fidèle apôtre, un halo de gnôle l’entourait, ils se sentaient honteux, d’avoir calomnié sur son dos. Lui, qui avait été choisi par le Maire, cette belle âme si soucieuse du bien-être de ses brebis égarés.

Il leva son postérieur, tenta de monter sur un tabouret avec beaucoup de difficulté, deux personnes durent l’aider pour se hisser si haut et le maintenir en place, il commença à haranguer le public :

« Un maire comme ça, on en a jamais eue qu’un !!!!! Y est pas question qu’il y en est un autre »

La suite du discours fut nettement moins intelligible, un mélange de borborygme et de syllabe :

On comprit difficilement qu’il s’était mis en tête de lancer une queue leuleu d’apocalypse, de convertir à la foi nouvelle, les mécréants de la ville. Que les gens avaient une mauvaise opinion du maire, parce qu’au fond, il ne savait pas quelle homme charitable, il était .Abreuver une foule exsangue, c’est un signe qui ne trompe pas. Il faut propager la bonne parole, ne pas laisser l’opposition crucifier un si bon représentant.

La foule, complétement désinhibée et n’ayant pas grand-chose d’autre à faire, n’attendant qu’un prétexte pour déclencher une croisade, ne s’ fit pas prier pour le rejoindre. Le maire qui ne devait pas s’attendre à autant de leur part ; leur promis l’absolution en leur filant des piles de tract de campagne et des badges à son effigie …

Seul, Dédé regardait tout ça de loin et avec beaucoup de dédain, il finit par sortir dehors, je lui emboitai le pas, sans me faire prier pour m’allumer un cierge pascale.

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28 décembre 2014 7 28 /12 /décembre /2014 09:10

Ce genre de créature ne sort normalement qu’au crépuscule dans ce type de lieu, que pouvait-il bien foutre par-là à midi moins le quart, le teint terne, la cravate légèrement défaite se voulant faussement décontracté, la démarche cow-boy, jambe arqué, sous-entendu implicite à la proéminence de son mandrin ou au défilé permanent de sollicitation qui venait lui tutoyer la prostate. Le tailleur portait le bonhomme tant il était sec. Il était grand à la façon dont on peut se représenter un Homme d’État.

Il était Suivi de son fidèle acolyte, un p’tit gars, chauve et rondouillard, très discipliné, qui transbahutait une étrange mallette en cuir comme si sa vie semblait en dépendre…

Dans le milieu, on l’appelait l’ombre, tant il emboitait le pas du maire. Un simili-bodygard, lui aussi en complet SVP. On eut dit pour un peu un représentant de commerce qui allait vous vendre dieu sait quoi d’indispensable pour un peu qu’on est un liard en trop.

L’étrange couple fit donc son apparition, le grand tout sec précédant le p’tit gros.

Le racket dont j’étais le sujet, avait été laissé à l’expectative, au silence, à l’attente.

Tous les yeux se détournaient de moi, IL captait tous les regards, toute l’attention. Son arrivé messianique laissait la foule dans l’attente du miracle. Il aurait lieu qu’on se le dise. D’ailleurs en guise de 3 Marie pour accréditer le miracle, on avait Germaine, Raymonde et bobonne (la femme du patron), le Vatican n’aurait pas le choix…

Le changement d’attitude des habitués m’avait saisi de stupeur. En plein milieu d’une scène de lynchage, les voilà qui s’arrêtent pour L’admirer dans une béatitude proche de la transcendance. La foule, quelques instants auparavant hyènes allant se partager une dépouille, s’était muée en gentils écoliers timide et plein d’admiration. Un instant suspendu dans l’éternité … C’est comme si c’était écrit qu’il rentrerait fort de sa superbe stature législative et que le silence se ferait, que le monde s’arrêterait pour LUI.

Était-ce dû à son autorité naturelle, son leadership, son charisme flamboyant ?

Rien de tout ça ne transparaissait chez lui. Il n’avait aucune allure.

Il brisa l’instant par un signe de la tête au tavernier. C’était entendu, le patron sortit des verres et des bouteilles spéciales de sous le zinc, tous les regards se tournèrent vers le bar, contemplation des verres se remplissant …

Le maire s’avança tranquillement, tapota sur le pupitre ou plutôt le comptoir.

« Tournée générale pour mes chers concitoyens »

La symphonie semblait rodée, l’orchestre au diapason. La soif les mit en branle, les instincts les plus primitifs se réveillèrent et déferlèrent, la ruée du verre , la lutte pour l’ivresse à l’œil en voilà du combat de classe, le premier à se remplir la lampe, ça jouait des coudes dans l’estomac, le bordel reprenait ses droits…

Je restais saisi d’effroi, sur ma chaise, en regardant le maire agir comme le veau d’or des poivrots, Où était passé leur fierté, eux qui n’acceptaient jamais quoi que ce soit et de qui que ce soit, se vautraient à la première opportunité pour un peu d’alcool.
J’étais assailli de réflexion stupide et incohérente, j’éprouvais même une étrange sympathie pour ce type. « J’ai du bol qu’il soit passé par là, sans son intervention, j’aurais pu être mal » « Quel brave homme, il vient payer un coup à ses citoyens les plus démunis » « Même un connard comme lui s’intéresse à des gars comme « nous » »

Oui, il m’arrive de me sentir indigent et de ne pas valoir mieux que le plus minable des poivrots, mes actes stupides, parfois, résonnent plus en moi que les pensées les plus profonde et contradictoire qui animent mon étrange psyché…

Je suivi le mouvement, grisé par la masse, je fis comme les autres et porta le verre à mes lèvres. Quand soudain, aux milieux des rires gras et autres rots, mon cerveau se remit à fonctionner, l’effroi laissa place à la révélation : « Attends, pauvre mouton, mais en fait, le maire, il nous ressort le plan sécheresse, demain, c’est les élections municipales ».

Le maire, mais encore… qui était-il ? Cet étrange personnage, un arriviste tout droit sortie du XIX éme d’un vieux roman de Maupassant. Non, un personnage mais bien de son époque, comme on les produits en masse …

Une description du maire et de sa ville me semble toutefois inévitable, avant d’aller plus loin dans l’histoire. L’aparté risque d’être un peu long …

Son curriculum vitae, vous vous en rendrez compte n’a en soi rien d’exceptionnel, si on devait le comparer à d’autres potentats politique d’une ville moyenne, mais c’est sa faculté à rester en place qui forçait mon admiration et ceux malgré toutes ses casseroles. Et puis, merde, c’était mon maire et cette ville c’était au moins autant la mienne que la sienne …sic…

Au long de ses différents mandats successifs, c’était alors sa vingt deuxième année de règne ininterrompu, le roi tranquille n’avait pas branlé grand-chose si ce n’est sa nouille, je supposais d’ailleurs, qu’à cet effet, il avait réquisitionné la majorité de ses employés municipaux à plein temps.

Cette cité, autrefois dynamique, avait hérité du surnom de belle endormie, elle me paraissait plus proche du coma.

Fabriques et usines fermaient les unes après les autres pour s’installer vers des ailleurs plus enclin encore, à d’avantage de compromission, même les institutions publiques fermaient. Les petits commerces ne subsistaient pas plus de 2 ans. La lutte des classes étaient devenues la lutte des places dans l’esprit du prolo moyen du coin, quitter la ville une solution…

Ainsi cinq pourcent de ses administrés foutaient gentiment le camp de sa ville chaque année au profit de villes plus attractives. Ne restaient que les retraités séniles, les propriétaires (coincés avec leur prêt sur 20 ans et une baraque invendable), quelques fonctionnaires, divers employés de services à quart temps, et du chômeur et amateurs de subsides sociaux à la pelle, tant le prix des loyers devenaient bas qui atterrissaient là, un peu par la force des choses.

La ville crevait, lentement et gentiment, dans son inertie. Certes la ville avait une grande histoire, mais son futur ne semblait être fait que de soins palliatifs, de perfusions de toutes parts et de beaucoup de morphine.

Beaucoup de citoyen, essayèrent de changer les choses, à leur échelle, ou en proposant des actions locales, histoire de sortir de l’état végétatif. Mais rien y faisait, invariablement, les pouvoirs publiques laissait crever les initiatives, faisant la sourde oreille, se contentant de maintenir artificiellement les organes vitaux, histoire de profiter de la rente qu’offrait cette naïve comateuse…

Plus rentable et tranquille comme situation, on ne le condamnera pas pour acharnement thérapeutique, qu’on se le dise.

Si il y avait eue débat public doit on euthanasié la ville, personne n’aurait compris. Les gens crispés, vivaient dans leurs souvenirs, refusant de voir la déroute. Pour oser aborder un débat sur l’euthanasie, il aurait d’abord fallu admettre que la ville soit dans un coma artificielle, hors la population vivaient dans le déni complet. Plein de sentiment naïf, vaquant à quelques obscurs occupation, histoire de tromper l’ennui et ne pas trop regarder la réalité en face, d’autres se réfugiaient dans la boisson et autre drogue (le maire y compris, il fallait bien qu’il occupe un peu son temps le pauvre bougre. Dans ce naufrage, c’était la seule bouée de sauvetage. Il était capitaine, et après tout, les actions raisonnables, il avait déjà toutes les évalués, il avait dû se rendre compte LUI, c’était foutu, il fallait juste donner le change, le temps que la ville crève)

Comment avait il fait pour en arriver à là ?

Son parcours politique était un poème désenchanté, dégueulé délicatement à la face du monde.

A 22 ans il était inscrit au barreau, il était épris de justice, plein de conviction il avait même milité pour la liberté du Tibet. Son parcours d’avocat, il y réussit avec grâce. Cette grâce insolente de cette jeunesse qui ne doute de rien et redonne des couleurs à la vie, enfin surtout la sienne. Il monta rapidement son propre cabinet d’affaire. Il devint vite florissant. Il vogua de compromission en compromission, reléguant ses scrupules, de cocktail mondain en cocktail mondain, ses convictions se teintèrent d’un nouveau vernis plus passe-partout et consensuel qu’une guimauve, il se fit un réseau avant l’ère du tout numérique, c’était un esprit d’avant garde. Rapidement il brigua des places aux seins des conseils municipaux fort de toutes ses compromissions, monta les marches quatre par quatre. Devint adjoint au maire puis poussa le dit maire du haut de la falaise électoral, pour un poste qu’il ne quitterait plus jusqu’à aujourd’hui. Mais sa soif dévorante de pouvoir s’était muée en volonté de suprématie, il s’investit dans chaque brèche qu’offrait la vie publique, député , président de la communauté d’agglomération, cumulard de tous les mandats , président d’honneur de toute institution publique , d’associations, sa gueule serait partout, omniprésent…Il incarnait LE politique locale, reléguant au rang d’anonyme frustré chaque opposant. Le charisme, la crédibilité, l’efficacité du parti d’en face (le grand parti mou qui se disait de gauche) n’arrangeant rien à l’affaire tant leur nullité était de notoriété publique.

Une fois qu’il eut cumulé chacune des places existantes disponibles et cumulable (avec avantage et retraite qui vont avec), il prit une visseuse et se fit clouer le cul à son siège multitâche. On ne le délogerait plus. Son sourire, ses bons mots, ses yeux tendres, voilà ce qui servit de clou. Son cul saignait, chaque vote comme un coup de marteau romain. Ah, le sacrifice de sa propre vie pour le grand bénéfice de la sainte collectivité. Dans cette pieuse cité millénaire, archiépiscopal de surcroit, on avait le sens de la foi, du divin et du sacrifice. Et on avait besoin de croire, le Messie : ce serait LUI ! On le crucifierait encore, encore et encore, avec des scores de dictatures Africaine (on frôlait les 70 % à chaque fois) on chanterait ses bonnes paroles et on répandrait la bonne parole. On serait dans la merde, mais avec foi. Au fond, pourquoi changer, la merde n’aurait pas meilleur odeur si un autre venait à la chier, seule la couleur changerait pas l’odeur. Et puis la majorité ne croyait déjà plus en la démocratie représentative, depuis belle lurette, très certainement à raison. La contreéducation politique avait réussie à saper toute notion de politique alternative et le fatalisme planait jusqu’à se muer en apathie profonde. Dépossédé de toutes alternatives, il ne restait plus qu’à ramper devant le messie indéboulonnable.

On ferait donc des processions en se trainant par les mains, cul nu, on lui demanderait les écrouelles, le paradis sur terre serait là, il suffisait de demander un truc au maire, l’absolution serait donné à chaque nécessiteux.

Ce christ porté au nu, par l’agora, avait en guise de couronne d’épine, son écharpe tricolore. Dans sa jeunesse, une voile qui le portait tel un bateau ivre de pêche miraculeuse en pêche miraculeuse.

Aujourd’hui, un tissu trop grand pour son corps sec et vouté par l’alcool, une ancre qui ramenait doucement l’épave vers le fond.

Son énergie, il ne la déployait pas exactement à ne rien faire, sa force, sa vie, il la dédierait à être en campagne permanente, toutes ses actions n’avaient qu’un seul but, se faire réélire, garder le siège bien au chaud.

Ainsi il n’entreprit aucunes grandes actions, de celle qui marquent une époque, transforme une ville avec de l’ambition pour « redynamiser » quitte à mécontenter quelques citoyen ou se planter.

Non, il passait sa vie à répondre à des exigences toutes inconciliables entre elle, n’entreprenait que des projets satisfaisant les patrons des entreprises du bâtiment et travaux publiques se faisant gruger complaisamment au passage beaucoup de deniers publics, ou des grands projets évènementielles très couteux et sans lendemain.

Sa vision, son feu sacré, c’était la réélection jusqu’à la mort, point de projet pour sa cité, un projet pour lui !

Ces actions marqués par la volonté de séduire, n’avait aucune cohérence politique, ainsi le député-maire coupa court à tout débat et se déclara apolitique, ce qui mit à mal ses opposants qui n’avait plus d’outils idéologique pour l’attaquer. Et ce même si, ses votes à l’assemblé nationale allait toujours dans la direction de ce parti droitard et vulgaire comme un clip de rap commercial. Pas d’idée, pas de projet mais niveau style un gros cul parkinsonien nue et syphilitique sur ton pif, ça fait bander l’électeur moyen. C’était la logique philosophique politico-économique de l’époque.

Je sens que mes lecteurs se font chier :

Pour parler à la résignation profonde qui anime votre cerveau de lecteur, je vais tenter ici d’esquisser une allégorie plus parlante si vous n’avez cure de la trame politico-économique qui agite notre pays depuis 1977 :

BASSE/ RYTHMIQUE : « POUM POUM » « Tchikiti pat , vlan paf » Invariable, fondé dans le marbre comme une constitution.

Un type pouvant être patron en costard ou un politicard en costard (dans mon imaginaire les deux se confondent) , la cinquantaine, avance vers l’angle fixe de la caméra, gros plan sur face décontracté avec une chaine en or, il est vraiment zen et bien dans sa peau. Son costard doit être fait sur mesure. Bref il a la classe.

PATRON/HOMME POLITIQUE : « « wouais gros »

La basse, la boite à rythme lance la boucle archi prévisible, un sample de piano martèle ad nauseam 3 notes aiguë, gratuite et libre de droit d’un sample de Wagner parce que faut pas déconner avec les droits d’auteur et quitte à faire une mélopée, autant en réchauffer une au micro-onde dans l’inconscient collectif, ça passe mieux et ça limite les risques).

Plan large caméra, le patron toujours décontracté sort dans la rue, avec des flics sortant de nulle part et qui le rejoignent au fur t à mesure puis qui l’entourent, le protègent, le couvent tel une diva, et bousculent ceux qui entravent sa route ou veulent lui parler.

Lui, marche tranquille, l’œil amusé et se réjouit de voir les autres passants tomber et bouffer du bitume, il se fout notamment ostensiblement de la gueule d’une grand-mère qui vient de se faire renverser par un camion de la collecte des déchets après avoir été lancé avec force et fracas par ses chien de garde sur la voirie

Tout d’un coup, il a le coup de foudre, frétille, tape des mains jouasse, il désigne un anonyme passant, le premier connard qui passe ? Non. Il est indifférent à ce défilé, en a royalement rien à foutre, lui est mal dans ses pompes, il est fagoté de vêtement dépareillé, clope au bec, ce « pouilleux » a d’ailleurs un sachet du secours catholique, il faisait que passer mais il ne va pas y couper, il n’y entend rien, essaye de s’expliquer, les flics le maitrise et l’embarque comme un paquet de barbaque.

Fondu noir. On est dans un open space d’un blanc immaculé (tout est blanc, mur, mobilier et bureautique). Il l’installe sur un fauteuil à roulette, les flics attachent ses avant-bras avec des colsons sur les accoudoirs , le patron/homme politique monte sur le bureau, se défroque. Plante son cul dans le nez du pauvre passant. Un flic maintient le fauteuil.

Gros plan sur le visage du patron sur lesquels semble se dessiner un certain plaisir.

PATRON/ HOMME POLITIQUE : « BITCH, SENT MOI LE CUL, BITCH »
« BITCH ADORES LE BI
TCH ! » en boucle quatre fois.

ZOOM ARRIERE BREAK du poum poum. Les flics entament avec leur matraque une chorégraphie de majorette et se déhanchent comme de jeunes pucelles, le cul zoukant ferme. Le passant essayent de dégueuler dans le rectum du patron, celui-ci serre les fesses, la gerbe s’étale sur les vêtements du passant. Les flics semblent outrés par cette attitude, lancent un regard noir et commencent à le matraquer en rythme. Le poum poum peut reprendre. Des petits jets de sang de ci de là, donnent un jolie teinte chatoyante à l’open space. Pour un peu, on s’approche d’une œuvre d’happening contemporaine. RE ZOOM sur le visage du patron/homme politique

PATRON/ HOMME POLITIQUE :


« T’as cru que t’étais qui ? Pétasse, tu n’as aucune classe! »

Le patron se dandine le bassin, toujours avec son haut de costards et reste défroqué, il y a beaucoup de dignité sur son visage et a l’air très sûr de lui

« Tu seras ma pute, je veux que tu sois en rut ! »

Le ton de sa voix n’a rien d’incantatoire, tout parait très légitime, d’ailleurs les flics opinent du chef en rythme avec le POUM POUM

PLAN resserré, sur les yeux de l’homme politique/patron

« Je veux que tu m’aimes, je veux que tu jouisses, je veux faire saigner ton cœur à vif, fais en ton leitmotiv ! »

Ses yeux sont remplis de sincérité, de force et de conviction, devant tant d’effort on a pas envie d’y croire, on y est forcé.

PLAN américain, de la tête du passant dans le fondement du gars en costard

« Pas d’échappatoire avec mon boulard , je veux de toi un orgasme devant mon cul, pas un spasme d’ingénue »

Fondu accéléré d’une foule d’image sur une montée de rythmique en moins de 2 secondes, c’est frénétique, ça mélange des images aussi diverses qu’un type unijambiste s’amusant follement en jet ski, un gars qui galère dans un dilemme infini à choisir sa cravate, un nazi qui viole un clown, un flute de champagne multicolore au teinte acide hors de prix qui moussent, un crétin d’ouvrier qui attend son bus en jogging en lisant la page sport du figaro, une image d’ouverture de la bourse de Paris, un rush où les gens se piétinent la gueule lors de la liquidation d’un magasin, une lettre de licenciement accompagné de bon de réduction pour de la pâté pour chat, des images d’un bordel dans un pays du tiers monde de gamines pré pubères rongé par la syphilis avec des T Shirt dora l’exploratrice, un hummer qui s’accouple avec une limousin, un diners mondain avec plein de gens en extase devant de la nourriture moléculaire ressemblant une conférence pharmacologique, un file d’attente pour les soupes populaires avec des gens en pyjamas rayés , une vache qui rit et chie des bouses en or, un hamster qui fume du crack, un gars qui se fait pisser dans la bouche, un robot humanoide Japonais qui se masturbe devant un IPAD, une voiture en grève devant une pompe à essence, , un cigare cubain en string tout feu tout flamme, un homme très musclé et tout huilé en slip arrachant un dictionnaire, un syndicaliste à genoux, la mine décomposé, s’arrachant les cheveux et pleurant devant le code du travail, une forêt toute contente de se faire raser car l’épilation ça a du bon et pour clôturer cette montée magistrale un gros étron qui danse d’une manière telle qu’il nous arracherait presqu’une larme.

« Que tu dises qu’il sente bon, pas de simulation, tous les matin en te levant, fais en un saint sacrement ! BITCH !»

Entre le sang et le vomi, notre passant est un peu groggy et sonné, ce qui donne le sourire à tous les flics, qui reprennent avec entrain leur jolie chorégraphie de majorette, en balançant au passage quelque coup de matraque dans le gueule du type et ce ,toujours en rythme.

Le type défroqué, n’en finit pas de se remuer l’arrière train sur la partie saillante du passant de plus en plus proche de l’inconscience

PATRON/ HOMME POLITIQUE : « BITCH Je veux qu’t’en dormes plus la nuit, que l’angoisse te fasse aimer mon puit, plois toi, crois-moi, crains moi, ton avenir n’aura plus d’autres horizons, que celle de mon fion ! »

« si je te chies des macules de merde dans les narines, des petites particules fines, gonfle toi à bloc, surtout faut pas que tu te bloques, les poumons ouvert à fond et repais toi, la merde se sera toi ! BITCH »

Le fauteuil tombe avec le passant dedans, il est complètement dans les vapes, les flics le ramassent, le jettent dans les chiottes, le sanibroyeur a du mal, les flics rentrent le type tout entier dans l’évacuation à coup de talon en le réduisant en bouillie. Puis dans l’open space blanc, une autre équipe de flic arrive avec un autre type qui n’y comprend rien et probablement choppé dans la rue, et le type défroqué tape des mains en sautant…

Fin de l’allégorie. Bon clairement, ces théories politico-économiques ne sont pas directement exposées sous cette forme stricto-sensu, mais leur articulation dans mon esprit, revêtait cette image odorante.

Revenons donc au maire, l’apolitique qui s’affichait en toute occasion, toute circonstance avec cette clique, votait (par procuration, chose bien pratique pour lui) chaque texte, article de loi que désirait ce parti.

C’était juste un tour de passepasse vis-à-vis de son électorat nigaud qui croyait sincèrement l’apolitisme de son maire. D’ailleurs à l’assemblé national , il détenait un record incroyable, le record d’absentéisme. Les médias se gaussaient de lui, mais dans son fief, tout le monde s’en foutait. Le cumulard se défendait en disant qu’un poste de député devait être au plus près de ces citoyens afin d’écouter leur doléance … Quid de leur représentation à Paris pour les défendre et les représenter car c’est là le rôle « à priori » d’un député. Mais de cela, les électeurs n’avaient cure. Comprenaient-ils seulement à quoi cela servait ? Et puis lui ou un autre…Et cela servait-il vraiment ?

Autant claquer des dizaines de millions pour être un ville étape du tour de France, rénover une piscine en foirant les plans de construction, un théâtre dans lesquels n’allait jamais ses citoyens , et puis pourquoi pas construire un golf pour relancer l’économie et faire un hôpital avec des vices de forme au frais de la municipalité qui nous endetterait pour 40 ans… Là, on parle de projet d’envergure ! Ça, ça parle au chaland !

Trêves de digression, revenons donc à la vigie Française, où l’on apprendra qu’il n’est pas nécessaire de bourrer des urnes pour gagner une élection mais de bourrer la gueule de ces citoyens pour garder le pouvoir.

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 16:20

Elle avançait chancelante. On aurait la camarde ou un drôle de bouffeur d'âme Nippon.

J'essayais à présent de me cacher derrière ma tasse, d'enfouir la tête sous mes épaules. Inutile elle m'avait ferré.

La voilà qui m'apostrophait :

« Jeune homme ! Oui vous ! »

 

 

Son expression si atroce sur le visage, son ultime technique : Payer pour qu'elle se casse.

Moi dans ma tête : «  Refuser ! Résister ! »

Je me devais d'être fort et inflexible pas de recours à la facilité, je n’en avais pas vraiment les moyens.

Je me lèverais de ma chaise pour lui balancer un « NON » bien senti.

Mais plus elle avançait plus ma détermination se faisait chancelante. Je n’arriverais pas à lui dire « NON ». J'étais pris par une étrange pitié, je faiblissais... Je sentais qu'elle allait m’avoir, le silence se faisait pesant, plus j'attendais pour répondre plus la réponse semblait dure à prononcer.

 

 

On veut être au calme, on s'assoit pour prendre un café tranquille et le monde se met en branle et vous rattrape vous fout en plein dedans le spectacle sans rien vous demander.

Pas la peine d'avoir un billet, la place est gratuite, obligatoire et personne n'en réchappera.

 

Me voilà bien emmerder. Je n’aime pas donner comme ça à des inconnus. Du moins, donner l'aumône... Étant jeunot, j'ai donné un casse dalle à un clodo qui s'en empressé de me l'envoyer dans la gueule. Incrédule j'ai récidivé avec un autre, ça a fini à la poubelle. Je ne comprenais pas… à l’époque. « Il a faim qu’il bouffe ce con ! »

 

A mes belles illusions de la jeunesse... Faut dire ce n’est pas de bouffe qu'ils avaient envie ces deux-là.

 

Je n’en ai pas tiré de conclusion hâtive: un gars a fini par accepter ma bouffe un jour d’hiver.

Comme quoi le don n'est pas toujours inutile, enfin plus que charité, je préfère la notion de don. Un don de bouffe, de clope, de bouteille, un truc qui sert à quelque chose très concrètement.

La charité en appelle toujours au fric. Un moyen facile de « se payer » une conscience sans se tracasser de quoi à besoin l’autre, voire carrément sur l’autre.

Petit monologue introspectif  dans l’esprit de l’âme charitable, dans les 5 secondes qui suivent l’octroi d’une piécette à un punk à chien, un kosovard, un romz ou dieu sait quel traine savate :

 « Avec l’argent, t’achèteras ce dont tu as besoin, mais surtout je paie alors vient pas m’emmerder avec tes besoins, ta vie, ton existence, je paie pour pas avoir à te regarder, pour me dire que j’ai fait un truc bien et donc que je suis un type bien, que j’ai respecté la vie, voir ta vie !Et j’ai une preuve j’ai payé pour…merde … je suis con, j’ai pas de preuve pour les impôts, si seulement je pouvais le déduire, je me suis fait avoir comme un bleue, la prochaine fois, je m ferais même plus chier à m’arrêter sur ta gueule, je donnerais  à « du beluga pour le crève la faim d’Ethiopie» ou « un IPAD pour les bébés du quart monde   », ils ont plus de besoin de fric que toi , avec les campagnes de pub qui font, ça doit leur couter un bras, j’ai entendu dire environ 50 % des dons passent là-dedans et c’est dire comme c’est urgent et comme ils en ont plus besoin que toi sale individualiste de mes couilles ! En plus je pourrais passer devant toi, fier et tranquille, l’esprit serein et net d’impôt, je te fouterais même un coup de pied au cul pour que tu trouves du travail … Quoi ? Y en pas ? Tu te fous de moi ? T’as qu’à le créer ton travail, deviens un self made men ! Quoi ? 5 % y arrivent et les autres à la rue ? J’t’en fouterais de la crise,  je paie des impôts MOI !!!! Connard !!!! ASSISTE DE MERDE !!!! »  .

 Je vois certains s’indigner, vous avez raisons, le type de personne qui pensent ainsi ne donnent jamais rien et ne peut donc se lamenter ainsi par la suite.

En faites, j’esquisse le secret désir qu’un jour, un de ces grand Homme se fourvoie au carrefour de son humanité et s’emmêlent le pinceau de ses valeurs pour se rendre compte de la vacuité de sa « charité ». Rêve …

La tristesse, c’est que ce pseudo monologue intérieur est devenue un discours d’Etat. Passons.

« Mais du fric, on en a toujours besoin !!!! », diront certains.

 Je pense qu’au fond, du fric , on en a pas besoin tant que ça . On se figure surtout ce moyen comme une fin. Une discussion de 5 minutes, un café, une clope ou un petit pain sera bien plus utile qu’une pièce. Mais pour cela, faut encore pouvoir regarder l’autre pour ce qu’il est, un être humain.

 Etant beaucoup plus de l’autre côté, si un inconnu venait à me donner une pièce parce que je suis mal sapé et suis dans la merde en train de cuvé, je lui balancerais sa piécette avec  un très fougueux : « Ta charité, tu peux te la foutre au cul » sauf si j’ai plus assez de force pour garder ma dignité ce qui arrive à bien des gens dans cette situation.

 

A force de sollicitation intempestive et avec le temps, devenait moi aussi fauché comme les blés,  tout ça m'a emmerdé. Les trois quarts des sollicitations étant des attrapes gogos... Des combines, des arnaques pour tirer les larmes et le fric qui va avec...

Les combines je croyais toutes les connaître, à chaque fois j'en voyais de plus inventive. La dernière ?

 

Dans le métro Parisien j'ai croisé une Esmeralda trainant son quasimodo boiteux en laisse comme un boulet, lui avait son genoux complètement à l’envers, la bosse proéminente, le regard torve et perdu et elle de secouer son sac à piécette « Argent pour li malireux », ce n’était pas la cour des miracles mais les touristes incrédules en route pour Notre Dame, face à tant de misère, se délestaient leur conscience à coup de billet...Ça leur ferait une anecdote.

 

S'épuiser à être bon pourquoi ? Se donner bonne conscience ? Au final sans doute Germaine avait-elle ses soucis et l'aider sur le coup ne les réglerait pas? Et moi j'en ai pas peut être ? N’étions-nous pas tous ici logé à la même enseigne celle de la promiscuité ?

 

Mais la Germaine me causait de la peine, avec sa gueule de boxeur et ses yeux de chiens battus ; ce qui me gênait c'est que sa cause n'avait rien d'une arnaque . La sincérité même de son aumône me touchait ...

 

Pris dans ce flot incessant entre l'envie d'aider et mes moyens plus que limité je sortais grand prince une pièce de deux euros...

 

« C'est tout? » qu'elle me sort.

 

J'étais offensé, merde. J'avais autant que cette soularde par mois. Je n’avais aucune obligation envers elle. Voilà pourquoi je n’aimais pas donné. Je me sentais encore plus con et faible que si je ne donnais pas .L'impression d'être pris pour une truffe et en plus je me sentais hypocrite.

 

La charité faut en avoir les moyens et ma connerie d'éducation me conduisait à des actions vaines et snobinardes. Que je pouvais me haïr en ces moment-là. Un prolo qui joue à ce qu’il n’est pas.

Ne pas donner pouvait être compréhensible mais si peu c'était indécent...

Voilà qu'on me toisait. Certains dans le bar me regardait sévèrement comme le derniers des pingres (ceux-là même qui s'empresserait de vider leur denier au PMU une fois Germaine partie et qui n'avait rien filer sur l'instant).

Le patron me regardait avec un air de supériorité, il me sortit un peu narquois :

 

« Tu lui règles sa note ? T'es en affaire avec elle ? Le plus simple serait que je te transfère l'ardoise ? T'en pense quoi? ».

 

Germaine, jubilait en dedans. Les autres me lynchaient du regard. J'étais l'inutile, le gars qui passe de temps à autre, avec qui on cause rarement. J'avais que peu à faire avec eux, au final, quantité négligeable donc sacrifiable, le parfait pigeon . J'étais plus du même monde. J'avais donné, ça me rendait suspect et coupable. J'avais commis un acte grave qui valait une excommunication. Je venais de juste de me rendre compte. On me foutrait tout sur le dos. Personne ne témoignerait en ma faveur au vu des apparences, tout plaidait contre moi. Je n'osais pas imaginer la note.

 

Et puis merde. Je ne suis pas Jésus. On ne me crucifierait pas le portefeuille.

Je ne paierais rien pour les conneries de l'autre malade.

Je décidais de ne pas me démonter, j'allais gueuler, enfiévré par le café.

 

Je conçus dans ma tête, un argumentaire mitrailleuse qui n'épargnerait personne :

 

«  Primo : Je ne connais pas la dame, ne suis nullement en affaire avec elle et ne souhaite pas être en charge des dettes qu'elle a contracté auprès de vous

Secundo : Je ne lui dois rien, en aucune façon, si je lui ai donné un faux espoir, ça ne regarde qu'elle.

Tertio : Je ne vous dois rien, j'ai déjà réglé pour ma consommation.

Quarto : Si dans votre bar en aidant quelqu'un on se charge de son problème en intégralité je souhaite récupérer mon don et j'en référerai aux autorités concernées

Quinto : Ce n’est pas des manières de traiter le client, ça va se savoir dans toute la ville cette affaire

Sexto : Vous autres clients si prompt à me juger et à faire les durs que faites-vous ? A part jouer au PMU et vous servir une autre bière ? ».

 

La clochette de l'entrée du bar sonna et ne me permit pas de me lancer dans ma diatribe.

C'était le Maire.

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28 avril 2011 4 28 /04 /avril /2011 16:58

 

Elle nous regardait, un peu égaré, comme déjà assommée par la menace du bistrotier.

Elle jaugeait le client, un par un, à la recherche du galant, du chevalier aux bouses pleines, qui viendrait la secourir.

L'ardoise de Germaine, c'était au-delà des moyens du client lambda. C'était deux mois à tourner aux pates et à l'eau plate pour le plus cossus d'entre nous, sans jamais sortir de chez soi pour ne pas abimer ses souliers bien entendu.

 

Sa bouche amochée, ses cheveux en sang, son regard mielleux à en coller les mouches et ses postures d'ingénue pour achalander le pigeon, rajoutaient une plus-value de ridicule à la scène.

 

Ne jamais négliger la solidarité chez les indigents, elle est souvent bien plus forte que la rapacité d'un trader.

Quelques vieux turfistes en venaient à hésiter entre regarder le résultat du PMU et les piécettes qui subsistaient dans leurs poches.

 .

Certains ne cherchaient  plus une solution mais plutôt qui pourrait résoudre le problème.

Là, les regards se passaient comme une bombe sur le point d'exploser.

Si elle avait eu trente ans de moins, ces mêmes gars se seraient éventrés pour s'endetter pour ses beaux yeux.

 

 

Germaine c'était une des rares présences féminines du bistrot et elle tenait toujours chaud en hiver.

Une véritable Saint Bernard du soiffard, la madone du digestif, la sainte du délirium tremens.

Les libidineux pensaient si fort qu'on aurait pu entendre leur pensée :

 

" Et si on faisait une tombola ou un Lotto avec elle en premier prix?" .

*

" Demandons de faire une cagnotte ou une cotisation pour la garder au bistrot, elle passerait du statut de femme public officieuse à celui de femme public officiel, ce serait quand même bien dommage qu'elle vienne plus ici".

 

Tout ça pouvait se lire sur le visage des avachis, les yeux s'interrogeant les uns les autres avec des mines de comploteur ou les yeux simplement en train d'implorer la clémence du patron.

 

Mais de tous ces échafaudages foireux, le bistrotier n'avait cure, son visage à lui, affichait un claire et sans concession "l'argent tout de suite et pas de négociation".

 

Ca semblait foutu pour elle. Aucun d'entre eux ne semblait vouloir se mouiller et de toute façon personne n'avait de quoi se sécher.

 

C'est alors qu'elle me regarda. MOI! Merde ... Quelle idée de se changer pour de se faire propret avant un entretien d’embauche, d'entre tous c'est encore moi qui avait le plus d'allure, qui semblait le moins fauché.

Je paraissais le plus légitime financièrement, « se faire beau », quel couillon que j'étais, d’autant plus que ce n’était pas mon habitude. J’ai toujours détesté « avoir l’air »… J’ai toujours préféré  « être » qui à « être » habillé comme sac.

 

Elle commençait sérieusement à me fixer avec sa gueule bancale. Je restais interdit devant mon café. J'osais plus regarder le spectacle. Péteux, mes yeux scrutaient le fin fond de ma tasse à la recherche du marc de café.

Certains y lisent l’avenir, à moi, à ce moment précis, aucun augure ne me semblait radieux.

 

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13 avril 2011 3 13 /04 /avril /2011 18:31

cafe

 

Le patron, un quinqua' tout fin, saisit la Germaine par le poignet et la tira à lui d'un coup sec.

 

Elle fut toute décontenancée d'être arrêtée dans son élan. D'instinct, elle essaya de se défaire en se trémoussant. Peine perdu. Le patron la tenait ferme. Voyant qu'il ne cédait pas. La voilà qui gueule comme une gamine capricieuse à qui l'on refuserait une glace au bord de mer, des petites larmes faisant même leur apparition. Le patron resta de marbre. Légendaire, il la traîna jusqu'aux toilettes.

 

« J'ai ce qu'il lui faut à l'autre dingue !!!! »Lâcha-t-il excédé.

 

Il lui enfonça la tête dans le lavabo et fit parcourir sur sa nuque un puissant jet d'eau froide.

Elle hurla à la mort. Des rires gras fusèrent de toutes parts. Elle le mordit. Surpris, il jura sans desserrer sa prise bien que ses yeux gonflèrent comme des baudruches.

De colère, il donna un grand coup de pied pour fermer la porte des cabinets, histoire de ne pas se donner plus en spectacle.

 

Dedans, ça gueulait, ça râlait... Ah l'extérieur aussi, les spectacles à l'œil sont pas légions.

Puis ça a aboyé pendant cinq bonnes minutes.

Un bruit de chasse d'eau clôtura le tout. Le rideau s'ouvrit : sortit alors le bistrotier éreinté, et la Germaine débraillée, lessivée.

 

 

Oh les esprits malicieux se réveillent mais il n'y a pas de quoi... Aucune grivoiserie, derrière tout cela, juste le flegme du plus vieux métier du monde et quel beau métier : celui de tavernier.

Il est apte devant toutes situations :

Un peu astrologue, il est prêt à faire redescendre des étoiles, les imbéciles perdus dans quelques nébuleuses.

Il dépasse le philosophe, le musicien, le scientifique, le comptable, le poète et l'écrivain réuni :

Véritable ascète contemplant les jouisseurs, ivres et vicelards à longueur de journée sans JAMAIS faillir. Lui a la tête entièrement consacrée aux saints chiffres. Il tient une bicoque et la fait tourner. De son but personne ne peut le détourner. Sa prose et sa symphonie se tient en une note.

De temps à autre, pour se distraire lance une pique méditative. Histoire de travailler l'esprit des contentés, cette peuplade qui hante par millions tous les bouisbouis des cinq continents.

Jamais méchante la pique, toujours pertinente, souvent issu d'une longue réflexion, fruit d'une observation scientifique et d'une introspection fine.

Un Platon à la maïeutique insoupçonnable, observez les nombreux clients qui rentrent chez eux en errant pendant des heures, bouleversé par la révélation.

 

Un bistrotier n'est jamais un moulin à parole, son savoir se diffuse à petite dose.

« Un qui cause de trop ferait fuir le client », pensez-vous. Pas seulement...

C'est bien plus profond, par le silence, il invite l'âme à se délivrer, et par la petite phrase juste il l'invite à étancher sa soif.

Capable d'écouter les confessions les plus ignobles, sans sourciller, pour leur donner l'absolution par la communion dans l'ivresse. En somme, c'est un vrai sacerdoce de prêtre.

Contrairement à ce dernier il ne jure pas vœux de chasteté mais à force de voir la chaire imbibée et molasse, son corps se forge une résistance, laissant ces turpitudes à ses clients.

 

Si la menace de l'éternité existe pour l'un, l'autre a bobonne avec ses menaces plus terrestres: Garde suisse à l'œil veillant autant à ses intérêts qu'à celui de son commerce.

 

J'ai une admiration sans borne pour cette profession qui en englobe tellement plus à la fois.

L'âme de la France n'a plus de secret pour lui. Il en le garant. Par la grâce de ses bulles, il calme même les plus velléitaires.

 

« Maintenant Germaine, on va la faire simple. Tu paies ton ardoise ou tu te casse. »

 

Elle regarde tristement la serveuse qui est aussi la femme du patron.

 

« Il a pas voulu qu'on s'arrange à l'amiable » lâcha Germaine d'une voix navrée.

 

Un sacerdoce que ce travail, vous dis-je, en même temps, refuser les compensations en nature de la Germaine était plus que compréhensible.

Pour ma part, elle aurait dû banquer la voie lactée plus quelques comètes rarissime pour que j'accepte juste une once de sa peau nue sur la mienne. (Rien qu'à cette idée ma peau en frémit). C'est un prix qui dépasse tout ce qu’elle ne pourrait jamais m'offrir, définitivement trop cher pour elle. Et chers lecteurs, n'y voyez pas là un simple aspect bassement pécuniaire...

 

Elle pouvait se retrouver interdite d'un de ses derniers passes temps: La chasse à l'ivrogne.

Une vague  de désespoir l'envahit.

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7 avril 2011 4 07 /04 /avril /2011 20:58

cafe

 

J’ai lu, ici et là, que les hommes étaient d'insoutenables bêtes violentes, que les femmes plus enclines aux dialogues, n'arrivaient jamais au même genre d'extrémité.

Ah l'image de la femme que certains romantiques ont essayé de peindre: douce et aimante. Un vrai bonbon. Sous l'emballage, le sucre. Plus cérébrale, toujours, plus raisonnable. Les hommes véritables guerriers, bidon de testostérone sur pattes en comparaison.

Une société de femme ? Une société de raison, de poésie, d'oiseaux chantant, de tolérance, où l'eau est toujours bleue, havre de paix, d'art et de beauté, sans guerre où la passion est douce et suave, redonnant un surplus d'âmes à la si triste humanité.

Ce qu'il y a de rigolo avec les représentations, c'est la faculté qu'elles ont d'éclater comme des confettis dès qu'on les confronte un peu à certaines réalités circonstancielles : un amour, une jalousie, une passion, une rancune, une méchanceté, une volonté de possession, de dominer, une occasion de piétiner la gueule à coup de talon de sa rivale, avoir le cran de protéger son foyer, son honneur ou ses petits … voir le tout accumulé.

Voilà  la femme qui n'y tient plus, se mue en tigresse avide de réduire en un ramassis de chaire celle qui se tient en face d'elle.

En général : l'alcool facilite le prodige de la métamorphose.

Cet accélérateur d'instinct primitif, ne rend pas idiot contrairement à certaines croyance. Il dévoile le raisonnement du corps, soumis à un esprit parfois trop encombrant, qui se défait de ses chaines morales reléguant le cerveau à ses fonctions les plus basiques...

                                                             

Voilà une raison de se battre pour certaines : Un brave ivrogne à la retraite qui dormait la moitié du temps sur le comptoir mais qui était toujours prêt à se réveiller pour payer sa tournée.

Raymonde l'avait hardiment désiré de tout son corps, car le Louis dans ses phases éveillées était plutôt beau parleur et pas avare en compliments. Le problème de Raymonde, c'est qu'elle avait pris trop l'habitude qu'on lui fasse la cour de manière éperdu, et qu'elle ne savait plus dire « oui » . Ainsi elle laissait lanterner le pauvre Louis car elle ne savait pas s'y prendre autrement avec les hommes. Et lui était bien souvent trop éméché pour aller plus loin et chacun rentrait gentiment chez soi.

 

Germaine, véritable bouée de sauvetage universelle, rodé à la solitude de par sa nature ingrate, donnait son corps à qui en voulait, aux premiers signaux, histoire de tromper l'ennui. Un soir où Raymonde n'était pas là, Louis, attaqué par l'alcool et l'absence de caresse, s'abandonna dans les bras de Germaine.

 

Pour Raymonde, ne pas avoir répondu à l'appel de ses désirs, rendait encore plus dur le deuil, car elle ne pourrait plus jamais assouvir son désir et qu'il s'abandonna dans les bras de Germaine lui était par trop insupportable. « D'entre toutes pourquoi ELLE ? »

 

Germaine, quant à elle, commençait à avoir ras le cul de cette chuineuse. Cette moraliste qui n'assumait pas ses désirs et le reprochait aux autres. C'était un peu fort. Elle allait lui en donner des raisons de pleurer à cette pimbêche.

 

Il en faut parfois peu pour se mettre sur la gueule...

 

Ce qu'il y a d'impressionnant, c'était le point d'orgue que deux femmes se mettent à vouloir ne pas mettre chaos l'adversaire, mais de faire trainer la joute, de réellement défigurer l'autre pour la faire souffrir sur une plus grande durée. Lui laisser séquelles aux endroits les plus visibles, pour qu'elle ne puisse plus sortir de chez elle. Que chaque face à face avec le miroir, le matin, elle puisse retrouver ses marques sur la gueule et sa coiffure décomposée. Pour l'obliger à rester cloitrer chez elle, le temps que les cicatrices visibles s'effacent pour faire bonne figure dans la rue.

.

Gravant dans l'inconscient de la vaincue, le danger de la confrontation, l’obligation de se cacher des autres en cas de défaite, la honte de ne pouvoir paraître, tout ceci, avec le temps, se transformera en soumission devant la valkyrie. Elle n'aura besoin que d'un simple regard pour lui soumettre sa loi, sa vérité et tuer toute velléité dans l'œuf.

 

Pour une victoire durable : la détruire physiquement et psychologiquement. La majorité des combats entre hommes ne vont pas jusque-là. Du moins pas aussi intentionnellement dans les gestes.

 

Le premier coup fut donc donné par Germaine à l'aide de son sac à main.

Raymonde, sur ses gardes, l'encaissa, puis saisit le sac d'un bras, tira de tout son poids en basculant vers l'arrière pour la ramener vers elle.

Son premier coup fut une solide empoigne de cheveux, qui moins résistants avec l’âge, s'arrachaient petit à petit. Une grimace se dessinait, au fur et à mesure, sur le faciès de Germaine, le rendant de plus en plus horrible.

De l'autre main, Raymonde lui griffa en surface la joue droite pour l'obliger à baisser les mains qui tentait de protéger les cheveux.

Entre les cheveux et le visage, Germaine devait faire un choix, elle concentra ses mains sur l'attaque au visage, pour se défaire de Raymonde. Une fois la main ôtée, elle repoussa son adversaire par une solide poussette, ce qui laissa Raymonde interdite une ridicule touffe sanguinolente de cheveux à la main.

Raymonde, qui pensait avoir fait le plus gros du boulot, relâcha son attention et souffla un peu, la joue bien rouge, elle pensait s'en tirer à bon compte.

Elle n'était pas au bout de ses surprises.

Germaine, touchée au visage et au crâne, devint démon. De petits borborygmes inquiétants sortaient de ci de là ainsi qu'un mince filet de bave se mêlant au sang qui coulait sur son visage.

Elle lâcha « un je vais te faire la peau sale bourgeoise ».

Elle prit un peu d’élan, elle envoya un coup de boule magistrale dans le nez de Raymonde .Le lino vert bouteille était perlé de sang. Elle brinqueballait, le nez un peu de travers.

Germaine n'allait pas s'arrêter là, son adversaire un peu sonné. Elle lui décocha une gifle dans la tempe. Ça fit un bruit sourd. Elle laissa sa main au niveau du visage, crocheta ses doigts en les rentrants dans la peau. Elle mit toute sa force vitale dans le bout de ses doigts. L'ongle cherchant à s'immiscer dans la chaire le plus profondément possible.

Elle tira délicatement vers la gorge.

La peau fripée de Raymonde se tendait comme un drap. Un vrai lifting de boucher.

 

 

Les hommes, à la vue du sang, commençaient à balancer leur bière, sur le ring improvisée, pour les exciter ou les calmer, c'était selon.

Germaine, exaltée, pris la tête de Raymonde à demi consciente, et la ramena à son genou tout en sautant.

Double fracture du nez...A peine se releva-t-elle pour hurler que Germaine lui remis une bonne claque dans l'autre tempe, appliquant sur l'autre joue sa terrible griffe de panthère.

Ce n'était plus un combat mais une corrida avec en guise de taureau, une vielle vache agonisante picadorée de toute part qui s'appelait Raymonde.

 

Germaine sentait monté en elle, une joie sadique. Elle souhaitait modeler cette tête. Les gars ne se tenaient plus, ça commençait à balancer tout ce qu'ils avaient à portée de main.

 

 

Le patron, à la vue du bordel grandissant, fit un bond par-dessus le comptoir.

 

« Marre de vos conneries !!!!!!!!»Gueula t il.

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28 mars 2011 1 28 /03 /mars /2011 18:46

cafe

 

 

 

Entra alors Raymonde, une sexagénaire, cheveux bouclés d'un blond pâlot.

Un fard aveuglant, sans vouloir trop détailler, des yeux minuscule, en passant du rimmel au rouge à lèvre, on pouvait qu'entrevoir une usine à peinture ambulante. Son visage était comme très attiré par le sol, surement l'appel de la terre, à cet âge l'attraction terrestre se veut irrésistible, le ver à l'affut... Il y avait des sillons sur le visage que le maquillage ne parvenait plus à cacher .Elle essayait de donner le change au temps, histoire de se racheter une jeunesse mais ce salop d'usurier n'a que faire, à trop vivre sa santé à crédit, elle avait la tête d'un interdit bancaire. Le reste du corps bien que flétri, était solidement gainé de toute part, comme un monticule qui menacerait de s'écrouler et qu'on calfeutrerait dans des grillages... Temporaire que tout cela, tant l'éboulement semblait inévitable. Ça ne leurrait qu'elle-même .Par coquetterie ou oublie: elle arborait avec nonchalance des charentaises, ainsi qu'un pardessus plus proche de la robe de chambre que du manteau.

 

Pourtant plus jeune, elle avait fait bien tourner des têtes. Sa beauté, cette fleur si ingrate qui se meurt au premier hiver, lui avait conféré comme une noblesse. De cette noblesse qui vous fait refuser les approches « gratuites », vous donne de la dignité, et laisse les soupirants médiocres baignés dans le son de leur propre mélopée jusqu'à  la surdité. Elle était exigeante. Elle s'était taillé la part de la lionne, la meilleure partie de toute la ville. Un avocat ! Pensez donc. Pas cette valetaille minable qui lui tournait autours depuis sa puberté. Sa beauté, c'était sa seule valeur marchande à la grande foire à l'amour. La jalousie devant tant de réussite lui fit perdre ses dernières amies. Mais c'était un vrai accessit pour une fille de prolo.

Ah la belle vie qu'elle avait eu pour elle .Ses voyages, son mariage, ses enfants...

Mais les années passant, l'alcool, ce serpent qui se tapie dans l'ennuie lui avait grignoté la cervelle.

Sans travail, ni tache domestique (une bonne, une cuisinière et un précepteur ne lui laissait que quelques misérable occupation), rien ne pouvait l'éloigner de sa solitude. Rien ne l'avait préparé à cela.

Son mari, qui était notable, ne la sortait plus tant il avait honte. Elle, de se morfondre, toute la journée dans son canapé un verre de blanc à la main devant la TV. Ses enfants, l'ignorant, tant elle ne leur offrit que déception.

Las de la situation, le mari se résolut à partir avec sa jeune secrétaire et ses enfants, après trente années de mariage, laissant à la veille Raymonde une pension et des souvenirs.

Pour elle, cet  abandon fut une révélation, son unique homme et les enfants partis, elle pouvait enfin vivre sa vie sans remord aucun : Elle ne changerait plus ses mauvaises habitudes, trop vieille pour cela. Au contraire, elle les assumerait  en passant la majorité de son temps à dilapider sa pension au bistrot où les solitudes grasses se noient. Cette communion de la buvette qui l'absoudra

Question d'économie : la Raymonde arrivait toujours bourrée.

Ainsi après être entré dans le café , elle manqua de s'écrouler en essayant de se rattraper au bar.

 

« AHHHHHHHHHHHHh Louis... LOUIS. Louis ? Louis ! Louis : « Louis », Louis. Louis ; Louis »

Invectiva-t-elle au premier demi servi.

 

On attendait la suite de cette étrange élégie funèbre, un peu sur notre faim. Elle se ressaisit quand elle l'aperçut l'auditoire baignant dans une attente molle.

 

« Les meilleurs partent les premiers, c'était bien le plus gentil, toujours prêt à filer à coup de main.

Vous ! Tous là MISERABLES ! Vous lui arriviez pas à la cheville. Le meilleur des hommes... Comme on ne refera jamais plus. »

 

Germaine s'avança pleine d'une compassion chancelante vers la Raymonde.

Germaine, elle aussi, faisait partie du décor de la vigie Française. Un peu plus jeune que Raymonde, elle n'avait aucun élan, aucune grâce, aucune d'espèce d'intelligence .Elle était là à la manière d'un tabouret. Elle, n'avait pas de passé, pas de présent et encore moins de futur... Sa vie semblait commencer et devoir se clore avec le café. Vague pot de gélatine incolore et inodore … Elle se grimait et s'essayait à ressembler à ces mannequins quinquagénaires à la mode. C'était raté. La décrire au-delà serait cruel.

Elle ne servait à rien, si ce n'est commérer et aider les plus ivres à rentrer chez eux tard le soir.

Hors du café, son existence devait se borner aux carreaux de sa fenêtre, de par où elle épiait le quotidien des autres.

 

« T'es bourrée Raymonde, tes mots dépassent ta pensée, c'est normal... T'as de la peine... Je te comprends... Le Louis malgré l'âge c'était un bonhomme! » Lança-t-elle d'une voix au relent d'un beaujolais médiocre, un sourire en coin.

 

"Un bonhomme? Qu'est ce tu insinues?"

 

" Tu comprends très bien ce qu'est un bonhomme? Ou ça fait trop longtemps que tu n'en as pas eu un?"

 

« Grosses truies ! Comment oses-tu ? Dis-moi pas que tu te l'es tapé aussi SALOPE ! … La SALOPE : Tu t'es tapé TOUT LE MONDE ICI! »

 

Ce qui était bien évidemment faux .JAMAIS la peau de Germaine n'avait ne serait-ce qu'effleurer la mienne. Mais à la tête que faisait la plupart des autres gars du bar (chien pris en faute ayant chié sur le tapis), je devais être l'un des seuls.

 

Germaine qui se sentit profondément offensé par cette réponse hostile à sa sollicitude, sortit son sac à main.

Il était fait d'un faux cuir noir. Elle le fit tournoyer en l'air à la manière d'un fouet et molesta d'un coup vif le visage sec de la Raymonde. Cette dernière, d'un bond, se jeta sur les cheveux de l'autre tigresse et essaya de l'écheveler.

Robert et Dédé, gentiment imbibés, tentèrent mollement d'intervenir et de faire tourner court au dérapage. Peine perdu, l'imposant quintal Dédé et la force de persuasion de Robert, ne firent que décupler l'envie des deux harpies de se déchainer. Le peu d'énergie restant chez les gaillards, s'éteignit devant la lueur destructrice qui étincelait dans les yeux des furies.

Elles avaient des comptes à régler et ce n'était ni Robert ni Dédé qui pourrait y mettre un terme.

Tranquillement, les habitués commencèrent à encercler la bagarre avec leur chaise.

Confortablement assis, les spectateurs à leurs aises : la bataille pouvait commencer.

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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 15:48

cafe

 

 

« Bah oui ! L’enterrement, c’était Dimanche et on t 'as pas vu ... »

 

Petit bonhomme au visage rond comme la lune agrémenté, de deux oreilles décollées qui le rendaient encore un peu plus niais, pommette rougeoyante, affublé d'un sourire enfantin et innocent, le tout surplombé de frisettes et de petites lunettes rondes Robert avait pour lui une parfaite tête à claque.

Il était visiblement gêné par la situation car ses joues se faisaient encore plus rouge qu'à leur habitude et viraient au cramoisis. Oublier de venir à l'enterrement de son pote, le mettait dans une posture des plus que délicate. Il allait se faire vilipender par tout le bar si il ne trouvait pas une excuse solide.

 

 

« Je savais pas, on m'a rien dit, on me dit rien jamais rien. »

 

C'était venu comme ça sur l’instant. De l'impro pure mais ça ne trompait personne.

 

Surtout pas le vieux Dédé et ses cent quarante kilos de barbaques, il avait pour habitude de laisser reposer sa bedaine en appuie du comptoir, histoire de lui reposer le dos. Ça lui conférait comme une autorité morale. Ajouter à cela des longues moustaches en guidons, des rouflaquettes follement bouclé ,et de longs cheveux noir jais aussi gras que clairsemés , il était clairement l'alcoolique le plus bellâtre du bistrot depuis belle lurette. Rocker d'un autre temps dans son pantalon en cuir qui lui moulait son châssis et remontait sa bedaine qu'il masquait tant bien que mal avec sa chemise de bucheron et sa veste de chasseur.

Cet ancien maçon très gaillard, du haut de ses deux mètres avait des bras comme mes cuisses, il m'était d'avis qu'il était le genre de gars avec on trouvait facilement un compromis.

 

« J't'ai appelé vendredi soir ! Tu te fous de moi ? Tu te souviens pas? »

 

Robert commençait à perler du front. Il cherchait ses mots comme un trapéziste saisi de vertige en pleine cabriole.

 

« Euh j'étais bourré … J'ai cuvé jusqu'à Dimanche, je m'en souviens un peu de ton appel...

Attends...Mais... tu m'as rien dit … Tu m'as appelé pour … me parler de ta chienne. Que tu avais trouvé un chien avec le pedigree pour faire une portée ta chienne, histoire de revendre des chiots staff. Qu'elle allait bientôt mettre bas. Tu me demandais si j'en voulais un pour cent euros. J'm'en souviens  »

 

Robert savait qu'un demi-mensonge valait mieux qu'un mensonge complet. Un peu de vérité, un peu d'omission secouez très fort ...

 

«  Arrêtes. Tu as reçu un fairepart de décès comme tout le monde ici. Fais pas semblant. En plus je t'ai appelé pour savoir si tu connaissais quelqu'un qui puisse me dépanne un costard noir. J'en trouve pas à ma taille de seconde main.»

 

Dédé bien qu'un peu imbibé, s'était décidé à ne pas s'en laisser conter par un si approximatif merdeux de vingt ans son cadet.

 

Saisir le trapèze, ne pas regarder le vide... pensa très fort Robert

 

« Ah oui un costard ...pour vendre tes chiens et donner confiance au client! Il était pas question d'enterrement ! »

 

L'assistance avait du mal à prendre parti, les explications bien qu'improbable de Robert n'était nullement nié. Et entre deux pochtrons faire son choix... La logique du bar voulait que le moins bourré ait raison. Et comme Robert était encore sobre.

 

«T'es vraiment pas digne de l'amitié que te portait Louis » lâcha résigné Dédé, le nez dans sa bière.

 

«  Je savais pas... On m'a rien dit... Pourquoi je mentirais? »

 

«  T'es un roublard. Avec toi, ce serait pas la première fois ... »

 

« Qu’est-ce que tu insinues? »

 

L'occasion était trop belle. Dédé allait se lâcher, faire sa langue de pute. Parler de ce tabou qui planait sur Robert depuis bien trop longtemps. Rebondir, saisir le fer tant qu'il est chaud. Robert y laisserait des plumes.

 

«  On sait tous comment tu as eu ton poste ! On sait tous aussi pourquoi t'as toujours pas été viré !

Personne ne pourrait garder un emploie avec autant de bourde à son actif! »

 

« C'est toi le menteur... Encore cette affaire... Combien de fois je vais devoir l'expliquer pour que ca vous rentre dans le crane. On m'a pris parce que … j'étais le meilleur pour le poste, le plus … compétent, expérimenté. Voilà ! Et si on me vire pas ! C'est simplement qu'il y a personne qui pourrait me remplacer. Je connais tout le monde sur mon secteur. Si je venais à plus distribuer le courrier, les gens poseraient des questions, organiseraient un collectif pour me soutenir. Ça les foutrait trop mal à la poste. Je connais du monde. »

 

« Ça, on le sait que tu connais du monde... »

 

« C'est pas ça que je veux dire … Et tu le sais ! Je vends tous mes calendriers même ceux sur ce le cyclimse. Et ça, ça veut dire que les gens... ben, il m'aime bien. »

 

« Ouais … Ouais »

 

Dédé avait réussi son coup, une nouvelle hostilité naissait, réveillant suspicions et méfiance. Robert sentait les regards hostiles des habitués redoubler. Il savait qu'aucun mot ne pourrait le sauver.

Il était coupable.

Héros tragique, il commanda une bière au patron. Il y trempa ses lèvres. Il aurait voulu à cet instant s'y noyer. Des souvenirs de franches rigolades, avec Louis son compagnon de toujours, refirent surface. Une larme sourde et cruelle tomba dans le verre comme une dernière estocade.

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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 14:11

Ecrivain dramaturge mort dans d'obscur circonstance ou création d'Alfred Jarry et de Desnos.

Il serait né dans la ville de la bêtise Cambrai et serait mort dans le tyrol ,suite à une randonnée en montagne en solitaire

Le collége de pataphysique prétend que le corp momifié retrouvé dans l'Otztal en 1991 serait celui de Torma.

 

Son existence même n'est qu'une supposition. Il n'était d'aucun mouvement, n'aimait pas ce qu'il écrivait ...

 

Mythe légendaire de Cambrai (qu'aucun habitant de sa commune ne semble connaitre),qui est par ailleur ma ville, il n'en fallait pas plus pour que je lui rende un hommage en publiant un billet sur son compte.

 

 

julientorma.jpg

 

1. Pourquoi ne pas parler leur langage, sotte bourrique ? c'est la meilleure blague qu'on puisse faire et la seule vraiment déplacée. Le plus grand des ” crimes ” n'est-il pas le sacrilège ?

___

2. Le sacrilège n'est acceptable que comme jeu. S'il n'est pas un peu raté, il en arrive à se détruire. 

… Le sacrilège vraiment sacrilège est désinvolte et ambigu, -comme la beauté. Et c'est plus drôle.

___ 3. La pensée comporte une part de charlatanisme. 

Il n'est pas naturel de penser : il faut faire une véritable mise en scène de soi et des choses, sans compter l'artifice inévitable du raisonnement… Sans ces feintes la pensée n'est que naïveté (…) et au fond sottise : l'intelligence implique la tromperie comme la parole le mensonge.

___ 4. Chez les guillotinés, les réflexes de la vie subsistent pendant quelque temps.  -alors ? 

-ça devrait vous ” consoler ” puisque vous avez besoin de survie.

___5. L'homme est un oignon, le plus noble de la nature, mais c'est un oignon pelant -comme les autres. Une peau ? Vous ne croyez pas si bien dire. Mais si vous l'enlevez, vous en trouvez une autre et une autre… jusqu'au vide central ( pas bien grand d'ailleurs ). 

Pleurons, pleurons, Crocodiles, mes frères.

___6. De ma fenêtre : ” l'horizon quotidien des toîts “. Mon moi-toîts. 

-Si j'étais moi !

___

7. La blancheur est ignoble.

___

8. La société est un concert ( avec ses canards, bien entendu ). Mais le monde déconcerte. Pour se rassurer on feint de les confondre. On parle du ” beau monde ” ou ” d'aller dans le monde “. Demi-monde cosmique et comique.

___

9. Démon est l'anagramme de monde.

___

10. Je ne sais pas s'il y a des nombres. Et vous ?

___

11. L' oubli est ce qu'il y a de plus vivant dans la vie. Secret du renouveau magique et de la virtu. Apaisement aussi et seule solution : la solution de continuité.

___ 12. Les croyants sont bêtes parce que s'ils étaient intelligents, ils auraient déjà la bêtise de l'hypocrisie.  Il y a ceux qui ne pensent pas à croire et ceux qui découvrent qu'ils croient. Les premiers font les vrais croyants, comme les sauvages ou les sorciers. Les autres sont les jésuites ou les intellectuels, tous les cuisiniers qui accommodent les entremets de la certitude. 

Ceux qui osent s'avouer ce qu' ils pensent savent très bien qu'on ne peut pas croire. S'ils s'obstinent, on assiste aux classiques tentatives désespérées ( avec manifestations frénétiques ) : le catholicisme de Péguy (…), la psychose fasciste, la ” dialectique ” bolchevique, et d'une façon générale, l'agitation de tous ces énergumènes qui croient faire le ” bien “. La science est un opium dont on dit moins de mal, mais qui est très décevant, sauf pour les bureaucrates du cru.

___13. Je suis aussi cette ombre que je suis et que je fuis : 

Ombre d'une ombre, dansant sur les murs croulants de hasards, jusqu' à me devancer en ces moments où la chaleur le long du dos me dissout dans la vue de cette caricature forcenée qui m'effraie trop pour que je n'en rie pas tout mon soûl.

___

14. Je controuve.

___15. C'est dans les livres d'arithmétique que j'ai compris combien il était stupide de poser des problèmes. … Depuis, j'ai découvert que les problèmes ne sont même pas des faux-problèmes ! Larmoyante comédie toute cousue de fil à retordre, et qui consiste à tenter de réconcilier ce qu'on a d'abord soigneusement disjoint. Le Monde et l'Esprit, le Plein et le Vide, le travail et le repos… Pratiques qui n'intéressent guère que ceux qui n'ont pas à vivre. Car la vie - vraie ou fausse- se charge bien de noyer le poison dialectique dans le Phénoumène. 

Le contraire du problème est le poème.

___

16. La véritable intimité ( la seule ) est de corps à corps.

___

17. Eclairer la nuit ce n'est que la rendre plus évidente.

___

18. Ce n'est pas la lumière qui m'attire mais l'ombre qui me pousse.

___

19. Ils enfoncent des portes ouvertes, se vautrent dans l'évidence, s'en veulent enduire de couches épaisses pour ne plus voir l'obscur et après des pages d' équations arrivent enfin à poser : 0=0.

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2 mars 2011 3 02 /03 /mars /2011 12:03

cafe

 

«  Tu te rends compte. Il est même pas venu? »

 

Le barman tire la moue, à peine intéressé :

 

« Qui ça? »

 

Un peu aigri d'être laissé de côtés, Germaine, une dame forte rustaude, se joint à la conversation.

 

-« Bah le Robert ! Pardi ! Pas une lettre ou une fleur … Que dalle!"

 

- "Pourtant pour se rincer le gosier avec le vieux Louis, c'était pas le dernier."

 

-"Ouais cul et chemise qu'ils étaient, tout le temps au bistrot à refaire le monde..."

 

-"Dire qu'il est même pas venu au pot de la famille … Je veux dire, c'est pas le genre de truc qu'il pourrait trouver une excuse pour pas y aller."

 

-"Il me débecte. On est pas assez bien pour lui faut croire... On est son auditoire, son public pour ses exploits mais dans les coups durs, plus personne. Une enflure. Une crevure qui cherche à se faire mousser. Juste bon à être pisser voilà ce qu'il est !!!"

 

- "A ce qu'on dit il serait rentré à l'amicale juste pour trouver son boulot »

 

J'incline ma tête, ma curiosité piquée au vif , véritable rapace, mon oreille plane au-dessus du comptoir.

 

«  M’étonne pas... Un lécheur comme j'ai rarement vu, un pistonné de la première heure... »

« L’amical, j't'dis ... »

 

Robert, je ne l'ai jamais connu dans la promiscuité. C'était un petit gars avec un petit embonpoint, cheveux frisés, joues toutes rouges, avec un petit nez surplombé de lunettes rondes. Il faisait partie du décor du bar.

Il s'arrêtait couramment s'en jeter un derrière la cravate, dès qu'une pause le permettait. A midi, a dix heures ou quinze heures, le cul fermement posé sur un tabouret. Ça jasait pas mal sur son dos ici. Faut dire sa réussite relative suscitait quelques jalousies. Aussi, cet employé émérite de la poste aurait envoyé au garage pas moins de quatre véhicules de fonction, les envoyant immanquablement à la sortie de la ville au premier virage venu. Légende urbaine ? Sinistre vérité ? Seul Robert et la poste savaient. La seule chose qui était sure, c'était que le sympathique bonhomme buvait comme un trou sans fond.

Qu'avait-il encore fait pour que ses compagnons de beuveries en arrivent à dévoiler en public ses secrets les plus odieux. Car ici le piston, c'était vu comme la pire des compromissions possibles. « S'en sortir oui mais en gardant sa dignité ».  Mot d’ordre, véritable leitmotiv de cette masse d'indigent qui se donne rendez-vous à ce bar , pour qui le salut, si il n'était pas dû à la force des individus, n'était qu'une planche en bois pourrie, qui aurait tôt fait de sauver sans grâce aucune l'homme à la mer et lui donnerait une vie encore plus médiocre qu'elle ne pouvait l'être. Le rescapé gardant sa planche et la bénissant comme un veau d'or. Autant se noyer définitivement dans une action héroïque en tentant de faire cent kilomètres à la nage, au moins l'honneur serait sauf.

 

Ah j'en vois parmi les lecteurs s'interroger comment ces personnes assistés par l'Etat peuvent-ils tenir ce genre de raisonnement ? Quelles étranges contradictions les animent ? Pourquoi faire la fine bouche pour une main tendue et accepter le RSA ?

La réponse est simple, l'obole de l’État, cette maigre pitance, est totalement désincarné et quasi mystique. Obscurcie par une nébuleuse administrative, des rendez multiples, des contraintes kafkaïennes, des employés souvent dépassé et parfois odieux. Cette obole n'a rien de gratuit en soi. On ne vous la donne en rien. Juste en comprendre le fonctionnement (sans cesse remanié au grès d'un alinéa de loi) revient à apprendre une langue dont la grammaire changerait selon l'interlocuteur et selon les années. Un printemps perpétuel de la découverte se révélant par le biais d'un versement mensuel moins conséquent sur le compte bancaire (si vous n'êtes pas déjà interdit dans ces officines...). Un parcours administratif proche des écuries d'Augias.

Et s'amuser à toucher de l'argent d'un État qui vous a spolier bien plus durant vos années de labeur, admettez que ce n'est qu'une remise à zéro des comptes.

 

Alors qu'accepter une main tendu, il faut en découvrir la provenance, si elle est propre, savoir l'intérêt qui se cache derrière cette aide, quel compte vous aurez à rendre. En bien des cas, les âmes charitables si prompt à aider leur prochain , ne cherche rien de plus qu'à vous exploiter d'une manière plus raffiné. Il arrive qu'en acceptant cette main, vous pactisez avec le diable. On peut y perdre plus qu'on y gagne. Tout cela est très relatif cependant, en bien des cas  cette main sera acceptée si elle est tendue de bon cœur mais la vie vous apprend que le bon cœur n'est pas une vertu universelle. Et quand la multitude vous laisse si gentiment vous noyer, la main qui vient vous sauver semble, alors, suspecte.

 

J'attendais donc douze heures pour en savoir un peu plus. Ma curiosité à l'égard de Robert se faisant grandissante.

 

Entre Robert l'air penaud et insouciant comme à son habitude:

 

« Salut tout le monde »

 

Un silence pesant fut l'unique réponse, plus un bruit dans le bar, tous les regards tournés vers sa petite personne.

 

« Bah quoi? »

 

C'est Dédé qui lança l'affaire sur le comptoir comme on sort un cadavre d'un placard.

 

« Le vieux Louis!»

 

La voix de Dédé était pleine d'une colère à peine contenue.

 

« Quoi le vieux Louis ? Il est mort le vieux Louis ! C’est quand même pas ma faute.»

 

Robert était véritablement foudroyé par les regards de l'assistance. Il semblait pris de tristesse à l'évocation de son frère de cuite, pour un peu, des sanglots auraient éclatés.

 

 

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